L’enrichissement de l’uranium nécessite un grand savoir faire et des matériaux de grande qualité. L'Iran n’a pas choisi la voie la plus facile et la plus rapide s'il cherche la bombe
Le programme iranien repose sur deux types de centrifugeuses appelées IR1 et IR2. Les centrifugeuses de première génération IR-1, en service à Natanz, ont été développées à partir d’un modèle pakistanais. La mise au point de ces centrifugeuses a été laborieuse : 7000 étaient installées au printemps 2009 contre 3000 en 2007, beaucoup moins que les 54 000 planifiées en 2006. Les ingénieurs iraniens rencontrèrent de nombreux déboires dans la mise au point de ces centrifugeuses. du fait que le matériau constituant des rotors est soumis à des accélérations des dizaines de milliers de fois supérieures à la pesanteur.
Gholamreza Aghazadeh, l'ancien patron de l'Organisation de l'énergie atomique iranienne raconte : "Nos machines tombaient en panne fréquemment dans les premiers jours du programme. Une étude montra que des grappes de microbes laissées par inadvertance par les mains des techniciens travaillant à l'assemblage de centrifugeuses en étaient la cause. Cette petite quantité de microbes fut suffisante pour déséquilibrer la rotation et détruire la machine. Par destruction, nous voulons dire que la machine était réduite en poudre".
Ces difficultés conduisirent l’Iran à développer un nouveau type de centrifugeuses, dites IR-2, basées sur le modèle de centrifugeuses pakistanaises P2 de seconde génération. Un rotor en acier ultra résistant, permettait d’accroître la capacité d’enrichissement en tournant plus vite tout en diminuant le risque de destruction. Mais un tel acier était difficile à produire. L’Iran a alors développé son propre modèle en remplaçant l’acier du rotor par des fibres de carbone, une matière incroyablement résistante pour son poids.
Les recherches se poursuivent. En septembre 2009, l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA) annonce que ses scientifiques étaient parvenus à fabriquer une nouvelle génération, plus performante, de centrifugeuses.
Une production ralentie
Fin février 2010, lors d'un briefing à la Maison Blanche, les responsables de la haute administration ont déclaré posséder des preuves que l'Iran continuait à avoir du mal à conserver ses équipements d'enrichissement en état de fonctionnement. Des milliers de centrifugeuses installées à Natanz, son site principal pour l'enrichissement, ne tournaient pas. L'administration Obama déclarait que l'Iran ne produisait que 100 grammes par jour d'uranium enrichi, et que, même s'il en quadruplait sa capacité, il faudrait encore plusieurs années pour produire suffisamment pour une arme.
Difficultés techniques ou sabotages ? En 2008, le Président George Bush, après avoir refusé une demande secrète par Israël de bombes capables de détruire les installations souterraines du complexe de Natanz, aurait déclaré à ses interlocuteurs, selon de hauts responsables américains et étrangers, qu'il avait autorisé des actions secrètes de sabotage destinées à faire dérailler les développements présumés de l'Iran vers des armes nucléaires.
L'éventualité de sabotages s’est renforcée. En novembre 2010, des informations on fait état d'un virus informatique appelé STUXNET qui se serait attaqué au fonctionnement des centrifugeuses en détraquant les vitesses de rotation. L’AIEA constata que l'Iran avait suspendu quelques jours l'enrichissement à la suite de dysfonctionnements électriques sans que l’on puisse dire dans quelle mesure ces incidents étaient liés au virus. Peu après, le 29 novembre deux spécialistes du nucléaire étaient victimes d'attentats à la bombe par des assaillants à moto, alors qu'ils se rendaient à leur travail. L’un des scientifiques fut tué (le troisième en 2 ans) et l'autre blessé. Les autorités y ont vu la main du Mossad et de la CIA.
Malgré le savoir-faire acquis et les prouesses des ingénieurs iraniens, des mois de difficiles recherches et développements étaient encore nécessaires avant l’utilisation à grande échelle de ces centrifugeuses, dont l'emploi pourrait multiplier par 4 la capacité d’enrichissement. Les agences de renseignement américaines estiment alors entre 2010 et 2015, la date où l’Iran atteindrait la seuil technique requis pour fabriquer une bombe s’il le désire.
En janvier 2013, Téhéran informe l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de son intention d'utiliser des centrifugeuses de type IR2m dans l'unité A-22 du centre d'enrichissement de Natanz. Cette nouvelle génération de centrifugeuses plus modernes, serait conçue pour un enrichissement faible, inférieur à 5% et ne serait pas destinée à l'installation de Fordo. Cette installation était prévue progressive. Un premier lot de 180 centrifugeuses IR-2m aurait été installées durant le mois de février.
Avant de passer la main après l'élection de Hassan Rouhani comme nouveau président, M. Fereydoun Abbasi Davani, reponsable du programme nucléaire iranien, a chiffré le 17 août 2013 à environ 18.000 le nombre de centrifugeuses dont plus de 10.000 en activité, confirmant des chiffres donnés par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Sur les 18.000, environ 1.000 centrifugeuses sont de seconde génération, bien plus performantes.
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